dans la perspective tracée
par Hardin Tibbs ou Braden R. Allenby qui ont travaillé sur l’écologie
industrielle et envisagent le système industriel comme un cas particulier
d’écosystème, J. Benyus a dégagéune dizaine de principes du fonctionnement des
écosystèmes matures et complexes….
❐Utiliser les déchets comme ressources
Dans un écosystème mature,
production de biomasse et circuits de recyclage s’équilibrent. Ainsi, dans une
forêt, les végétaux morts sont récupérés et dégradés par des organismes
(champignon, moisissures, bactéries...), ces derniers redistribuant sous forme de
nutriments la matière ainsi transformée. Ce mode de fonctionnement n’est autre
que le modèle de l’économie circulaire
et plus encore de l’économie bleue,
qui consiste à boucler les flux de matières et d’énergie.
❐Ne pas «
souiller son nid »
Si des substances toxiques
existent dans le vivant, toutes les molécules qui présentent cette qualité sont
dégradables assez rapidement. En outre, les organismes ne les produisent qu’en
cas de besoin.
Par ailleurs, la modération
en matière d’utilisation d’énergie et de matériaux est généralement la règle.
❐Capter et
utiliser l’énergie avec efficacité
À l’exception des organismes
extraordinaires qui vivent dans la nuit des abysses et pratiquent la
chimiosynthèse, les écosystèmes reposent tous sur la photosynthèse. Les
photosynthétiseurs à l’œuvre sont exceptionnellement performants. En outre, le positionnement
des feuilles optimise leur exposition. « Ce processus efficace, qui recueille l’énergie
pour tous les êtres vivants, est un modèle pour tout écosystème» écrit Janine
Benyus.
Une fois que la végétation a
utilisé l’énergie captée pour croître et se reproduire, il ne reste que 10 %
d’énergie disponible au maillon suivant de la chaîne, les herbivores, puis 10 %
à nouveau pour celui d’après, les carnivores, et ainsi de suite. C’est ainsi
que « la pyramide de la vie est une véritable distribution de l’énergie, une
trace de la circulation de l’énergie solaire dans le système»
❐Optimiser
plutôt que maximiser
Un système mature se
caractérise par un taux de croissance moindre qu’à son origine et une faible
productivité. Il préserve la masse de ses matériaux et éléments nutritifs, et
les organismes y sont « récompensés » pour leur efficacité et leur capacité à
faire mieux avec moins. La diminution du rythme des flux conduit à une plus
grande stabilité du système et une plus grande résilience.
❐Ne pas
épuiser les ressources
En adaptant la forme à la
fonction, les organismes vivants optimisent leur production d’énergie et
l’utilisation de matériaux. La structure en nid d’abeille, qui allie espace
maximal et quantité minimale de matériaux de revêtement tout en assurant une
parfaite solidité de l’ensemble constitue un exemple de cette alliance entre
ingéniosité et minimalisme.
L’évolution a parfois permis
l’adaptation d’une même structure pour deux ou trois
fonctions. Ce réajustement
permanent favorise l’adaptation et les chances de survie avec une économie de
moyens maximale.
❐Se
diversifier et coopérer pour exploiter pleinement son habitat
Stimulés par les contraintes
(climatiques, géographiques, géologiques...) les systèmes naturels développent
une forme d’inventivité qui passe le plus fréquemment par le développement de
coopérations, voire de relations symbiotiques. Cette stratégie permet aux
organismes de s’attribuer des niches non concurrentes. Lorsqu’une niche est partagée,
l’allocation des ressources s’opère sans affrontements énergivores continues,
de sorte que les richesses d’un habitat sont réparties de façons optimales.
Pour évoquer ce mode de fonctionnement coopératif, l’écologiste Paul Colinvaux
emploie l’expression de « coexistence pacifique » bien qu’elle ne résulte pas
d’un pacte conscient entre les parties.
❐Se nourrir
d’informations
De nombreux canaux de
communication sont présents dans les communautés matures. Plus la biodiversité
est riche et le système complexe plus la coopération est efficace et plus les
organismes se doivent de développer des techniques pour signaler leurs
intentions à leurs voisins et interagir avec eux.
Ces messages sont nombreux,
éventuellement redondants et se révèlent performants dès lors que des
mécanismes de rétroaction vers tous les membres de la communauté sont assurés.
Un système qui permet aux changements affectant une composante de la communauté
de s’étendre à l’ensemble, lui permettant de s’adapter lorsque l’environnement évolue,
est gage de durabilité.
❐Utiliser
les matériaux avec parcimonie
Adaptant la forme à la fonction,
ils construisent du « sur mesure » avec le strict minimum de matériaux
(structure des rayons de miel...). L’évolution a en outre conduit ces
organismes à mettre à profit les structures ainsi créées pour remplir d’autres
fonctions. Avec cette adaptation, moins de dispositifs sont nécessaires à leur
survie.
❐Rester en
équilibre avec la biosphère
Les conditions nécessaires à
la vie résultent d’une série d’échanges des organismes avec leur milieu. Tout
ce qui est prélevé dans les stocks des principaux éléments biochimiques qui
composent la biosphère « à travers le processus de la photosynthèse, de la
respiration, de la croissance, de la minéralisation et de la décomposition est
remplacé dans les mêmes quantités : ainsi les stocks circulent mais ne
diminuent pas. »
❐Se fournir
localement
Faute de pouvoir importer où
de se déplacer sur de grandes distances, à l’exception notable des migrateurs,
les organismes vivant deviennent des experts de leurs propres milieux. La nature, en quelque sorte, « travaille sur
place ».